Je détestais ce mot de « justice de Dieu »

Je détestais ce mot de « justice de Dieu » que l’usage et la coutume de tous les docteurs m’avaient appris à comprendre philosophiquement de la justice dite ‘formelle’ ou active, par laquelle Dieu est juste et punit les pécheurs et ceux qui sont injustes (…). Je n’aimais pas ce Dieu juste qui punit les pécheurs, je le haïssais. Sans aller jusqu’à blasphémer, je me révoltais contre lui. Ne suffit-il pas, me disais-je, que les pauvres pécheurs voués à l’enfer par le péché originel soient en butte à toutes les calamités par la tyrannie des dix commandements ? (…). Dieu finit par avoir pitié de moi. A force de méditer jour et nuit ces mots : ‘La justice de Dieu est révélée dans l’Evangile selon ce qui est écrit : ‘Le juste vit de la foi’, pour découvrir le lien qu’ils avaient ensemble, je commençai à comprendre que la justice de Dieu, ici, est celle par laquelle le juste vit grâce au don de Dieu, c’est-à-dire par la foi. L’idée de Paul est que l’Evangile révèle une justice de Dieu en nous, une justice par laquelle Dieu par pure bonté, nous rend justes moyennant la foi. C’est en ce sens qu’il dit que le juste vit de la foi. Je me sentis alors absolument renaître. J’entrai au paradis toutes portes ouvertes.

Martin Luther, WA 54, 185, 12-186, 24

Cours de théologie morale sur le luthéranisme