Nous n’aimerions pas le bonheur si nous ne le connaissions pas encore.

Comment se fait-il que je cherche le bonheur ? Est-ce mû par le souvenir, comme si je l’avais oublié, tout en sachant encore que je l’ai oublié? Certain ne sont heureux qu’en espérance. C’est une façon de l’être inférieure à celle des hommes qui ne sont effectivement, mais qui vaut mieux que la condition de ceux qui sont heureux ni en fait ni en espérance. Cependant, ceux-là, s’ils étaient tout à fait étrangers au bonheur, ne le voudraient pas ainsi, et ils le veulent, c’est bien certain. Je ne sais comment ils le connaissent, ni quelle connaissance ils en ont. Ce qui me tourmente, c’est de savoir si cette connaissance est dans la mémoire, car si elle y est, c’est que nous avons été heureux autrefois. L’avons-nous été tous individuellement ou dans cet homme qui, le premier se rendit coupable du péché, en qui nous sommes tous morts et de qui nous sommes tous nés des être misérables? Je ne veux pas le rechercher pour le moment, ce que je cherche, c’est si le bonheur réside dans la mémoire. Car nous ne l’aimerions pas si nous ne le connaissions pas.

Saint Augustin, les confessions, Saint Augustin, La Cité de Dieu, Livre 10, 20

Cours de théologie spirituelle sur la loi naturelle