Je l’ai dit l’on voit, l’on comprend que l’on est enlevé, mais on ne sait où l’on va, de sorte que la faible nature éprouve à ce mouvement, si délicieux d’ailleurs, je ne sais quel effroi dans les commencements. L’âme doit montrer ici beaucoup plus de résolution et de courage que dans les états précédents. Il faut, en effet, qu’elle ose tout risquer, advienne que pourra, qu’elle s’abandonne sans réserve entre les mains de Dieu, et se laisse conduire de bon gré où il lui plaît, car on est enlevé, quelque peine qu’on en ressente. J’en éprouvais une si vive, par crainte d’être trompée, que très souvent en particulier, mais surtout quand j’étais en public, j’ai essayé de toutes mes forces de résister. Parfois j’obtenais quelque chose , mais comme c’était lutter en quelque sorte contre un très fort géant, je demeurais brisée et accablée de lassitude. (…) Lorsque je voulais résister, je croyais sentir sous mes pieds des forces étonnantes qui m’enlevaient , je ne saurais à quoi le comparer. Nulle autre des opérations de l’esprit n’approche une telle impétuosité (…) Au commencement, je l’avoue, j’étais saisie d’une excessive frayeur en voyant ainsi mon corps élevé de terre. (…) Souvent mon corps en devenait si léger qu’il n’y avait plus de pesanteur , quelquefois c’était à un tel point que je ne sentais presque plus mes pieds toucher la terre ». J’ai été rarement ravie de cette manière.
Ste Thérèse d’Avila, Vie 20
Cours de Théologie spirituelle par Mgr David Macaire le jeudi – 202-