Je ne devais vous demander que les choses qui ne pouvaient m’être communes avec les impies

Il montre toutefois combien il lui a été avantageux de n’attendre les biens mêmes de la terre que du seul vrai Dieu, quand il dit: « Je suis devenu semblable, devant vous, à une bête brute, et je demeure toujours avec vous » Par ces mots, semblable à une bête brute, le Prophète s’accuse de n’avoir pas eu l’intelligence de la parole divine, comme s’il disait : Je ne devais vous demander que les choses qui ne pouvaient m’être communes avec les impies, et non celles dont je les ai vus jouir avec abondance, alors que le spectacle de leur félicité était un scandale à mes faibles yeux. Toutefois le Prophète ajoute qu’il n’a pas cessé d’être avec le Seigneur, parce qu’en désirant les biens temporels il ne les a pas demandés à d’autres que lui. Il poursuit en ces termes « Vous m’avez soutenu par la main droite, me conduisant selon votre volonté, et me faisant marcher dans la gloire » , marquant par ces mots, la main droite, que tous les biens possédés par les impies, et dont la vue l’avait ébranlé, sont choses de la gauche de Dieu. Puis il s’écrie « Qu’y a-t-il au ciel et sur la terre que je désire, si ce n’est vous 3 ? » il se condamne lui-même, il se reproche, ayant au ciel un si grand bien, mais dont il n’a eu l’intelligence que plus tard, d’avoir demandé à Dieu des biens passagers, fragiles, et pour ainsi dire une félicité de boue

Saint Augustin, La Cité de Dieu, Livre 10,25