Il est indigne que soient honorés par d’honnêtes gens ceux qui se font apaiser par des gens méprisables.

Tu as éloigné de tes honneurs ceux qui représentaient les crimes des dieux , prie le vrai Dieu d’éloigner de toi ces dieux qui se complaisent dans le spectacle de leurs crimes, spectacle honteux, si ces crimes sont réels, spectacle perfide, si ces crimes sont imaginaires. Tu as exclu spontanément de la cité les comédiens et les histrions, c’est bien, mais achève d’ouvrir les yeux, et songe que la majesté divine ne saurait être honorée par tes fêtes, quand la dignité humaine en est avilie. Comment peux-tu croire que des dieux qui prennent plaisir à un culte et à des jeux obscènes soient au nombre des puissances du ciel, du moment que tu refuses de mettre les acteurs de ces jeux au nombre des derniers membres de la cité? N’y a-t-il pas une cité incomparablement supérieure à toutes les autres, celle qui donne pour victoire la vérité, pour honneurs la sainteté, pour paix la félicité, pour vie l’éternité? Elle ne peut compter de tels dieux parmi ses enfants, puisque tu as refusé de compter parmi les tiens de tels hommes. Si donc tu veux parvenir à cette cité bienheureuse, évite la société des démons. Ils ne peuvent être servis par d’honnêtes gens, ceux qui se laissent apaiser par des infâmes. Que la sainteté du christianisme retranche à ces dieux tes hommages, comme la sévérité du censeur retranchait à ces hommes tes dignités.

Saint Augustin, La Cité de Dieu, Livre 02,29