Si l’amour nous porte vers l’une plus que vers l’autre, reprenons-nous afin de ne pas nous laisser dominer par cette affection.

Je voudrais que ces amitiés-là soient nombreuses dans les grands monastères. A Saint-Joseph où vous n’êtes que treize et ne devez pas être davantage, je n’en veux aucune. Vous devez toutes être amies, vous aimer, vous témoigner de l’affection, vous entraider , et pour l’amour de Dieu, gardez-vous de ces préférences, si saintes soient-elles, car même entre frères elles sont généralement un poison – regardez plutôt l’histoire de Joseph – et je n’y vois aucun profit , entre membres de la même famille, c’est encore pire , c’est une peste. Et croyez-moi, mes soeurs, même si cela vous semble exagéré, dans cette exagération se trouve une grande perfection et une grande paix , elle délivre celles qui ne sont pas très fortes de nombreuses tentations , si l’amour nous porte vers l’une plus que vers l’autre (il ne pourra en être autrement car c’est un mouvement naturel, et souvent celui-ci nous porte à aimer la plus imparfaite si elle est plus favorisée par la nature), reprenons-nous afin de ne pas nous laisser dominer par cette affection. Aimons les vertus et les qualités intérieures, et veillons toujours soigneusement à ne faire aucun cas de ce qui est extérieur.

Ste Thérèse d’Avila, Le chemin de la perfection, Chapitre 5