Voilà ce que devinrent, au bout de quelque temps, peu après l’expulsion des rois, ces Romains dont Salluste nous dit: « Que leur caractère, autant que leurs lois, les rendait justes et équitables ». Or, si telle a été la république romaine aux jours de sa vertu et de sa beauté, que dirons-nous du temps qui a suivi, où, comme dit Salluste : « Changeant peu à peu, de belle et vertueuse qu’elle était , elle devint laide et corrompue », et cela, comme il a soin de le remarquer, depuis la ruine de Carthage? On peut voir, dans son Histoire, le tableau rapide qu’il trace de ces tristes temps, et par quels degrés la corruption, née des prospérités de Rome, aboutit enfin à la guerre civile : « Depuis cette époque, dit-il, les antiques moeurs, au lieu de s’altérer insensiblement, s’écoulèrent comme un torrent, car le luxe et la cupidité avaient tellement dépravé la jeunesse que nul ne pouvait plus conserver son propre patrimoine ni souffrir la conservation de celui d’autrui ».
Saint Augustin, La Cité de Dieu, Livre 02,18