Mais qu’importe aux adorateurs de ces méprisables divinités, aux ardents imitateurs de leurs crimes et de leurs débauches, que la république soit vicieuse et corrompue? Qu’elle demeure debout, disent-ils, que l’abondance y règne, qu’elle soit victorieuse, pleine de gloire, ou mieux encore, tranquille au sein de la paix,. que nous fait tout le reste? Ce qui
nous importe, c’est que chacun accroisse tous les jours ses richesses pour suffire à ses profusions continuelles et s’assujétir les faibles. Que les pauvres fassent la cour aux riches pour avoir de quoi vivre, et pour jouir d’une oisiveté tranquille à l’ombre de leur protection, que les riches fassent des pauvres les instruments de leur vanité et de leur fastueux patronage. Que les peuples saluent de leurs applaudissements, non les tuteurs de leurs intérêts, mais les pourvoyeurs de leurs plaisirs, que rien de pénible ne soit commandé, rien d’impur défendu, que les rois s’inquiètent de trouver dans leurs sujets, non la vertu, mais la docilité, que les sujets obéissent aux rois , non comme aux directeurs de leurs moeurs, mais comme aux arbitres de leur fortune et aux intendants de leurs voluptés,
Saint Augustin, La Cité de Dieu, Livre 02,20